une péninsule industrielle à un quartier urbain durable
Requalifier les friches industrielles pour construire la ville sur la ville
Offenbach Harbour, 1953
Encadrer la croissance urbaine
Les zones urbaines du monde ont une lourde empreinte écologique. En effet, ces dernières contribuent énormément dans les émissions de gaz à effet de serre, dans une proportion se trouvant entre 42 et 66 % (GIEC, 2014). L’une des principales causes de cette problématique est l’augmentation spatiale continue des espaces urbanisés (Bart, 2010). Au Québec, par exemple, la pression démographique, les préférences de la population à l’égard de l’habitation et la dépendance des municipalités sur l’impôt foncier (Généreux, 2020) donnent lieu à des problèmes d’étalement à faible densité lorsque la croissance urbaine est mal planifiée. De nombreuses villes européennes, dont Francfort, ont identifié une ceinture verte au pourtour de leur ville ou de leur aire métropolitaine afin de contenir cet étalement urbain. Quoique ces imposantes ceintures aient entraînées de nombreux bénéfices, notamment biologiques et sanitaires, il n’y a toutefois pas d’évidence qui permettrait de conclure de leur efficacité à l’égard de l’étalement urbain (Siedentop et al., 2016; Xie et al., 2020).
L’étalement urbain pose plusieurs problèmes au niveau des changements climatiques puisque les formes urbaines désorganisées et monofonctionnelles induisent une consommation inefficace des ressources et créent une pression sur les écosystèmes (Rey, 2002). L’augmentation des distances, par exemple, est fortement reliée à la demande en transport individuel, donc de l’énergie fossile (Rey, 2002; Vivre en Ville, 2015).
Les friches industrielles: définitions, opportunités et barrières
Une façon de freiner l’étalement urbain est le changement de paradigme dans la façon de construire les villes. Il s’agit de construire la ville sur la ville, c’est-à-dire de se tourner vers les opportunités qui sont déjà présentes dans le cadre bâti. Les espaces industriels désaffectés sont un exemple d’opportunité à fort potentiel pour absorber la croissance urbaine.
Les friches industrielles sont des espaces sous-utilisés insalubres, sont omniprésentes dans les villes des pays développés et sont souvent situées sur des sites centraux et d’intérêts (Benali, 2012; Dumesnil & Ouellet, 2002). Or, revaloriser ces espaces a plusieurs avantages, soit d’atténuer la pression exercée par la croissance urbaine sans construire en périphérie, mais également d’engendrer plusieurs co-bénéfices, soit l’augmentation de la rente foncière pour les municipalités, la réalisation de projets résidentiels, commerciaux ou récréotouristiques qui sont profitables, la renaturalisation et dépollution des centres-villes et, finalement, la perméabilisation du tissu urbain entre les différents quartiers et espaces sociaux adjacents (Sénécal & Saint-Laurent, 1999; Siikamaki & Wernstedt, 2008).
Malgré leur fort potentiel et que les populations locales sont souvent favorables à des projets de requalification, plusieurs défis rendent difficiles leur planification et leur mise en œuvre. La principale barrière est la nécessité de dépolluer ces sites et les coûts élevés et imprévisibles qui y sont associés. Les imprécisions juridiques (qui a la responsabilité de payer?), les aspects règlementaires peu adaptés à ce type de projet et la multiplicité des acteurs impliqués aux intérêts divisés sont d’autres barrières à la requalification des friches industrielles (Benali, 2012; Dumesnil & Ouellet, 2002; Siikamaki & Wernstedt, 2008).
Les facteurs de succès pour réussir un projet de requalification
Pour surmonter ces nombreuses barrières, plusieurs facteurs de succès ont été identifiées à partir d’exemples internationaux et sont à prendre à compte, en amont, pour mettre en place un projet de requalification (Dumesnil & Ouellet, 2002) :
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La collaboration est la condition la plus essentielle : pour que le projet soit compétitif, qu’il s’aligne sur les intérêts de l’ensemble des acteurs du territoire et qu’il soit accepté socialement, tant les secteurs public et privé que la population doivent être impliqués dans la conception. Les tables rondes ou les charrettes sont des outils intéressants pour aller en ce sens.
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L'intégration avec les infrastructures adjacentes déjà existantes ne doit pas être trop prononcé. L’intégration du projet doit être réfléchie et être considérée au sein d’une vision globale, dans le cadre d’un plan d’aménagement par exemple.
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Les autorités locales doivent rester actives pour maintenir l’attractivité des friches inexploitées. En effet, un terrain laissé à l’abandon trop longtemps perdra de son attractivité auprès des promoteurs.
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La décontamination du site étant la principale barrière pour la mise en œuvre d’un projet de requalification, cet enjeu et les coûts qui y sont associés doivent être clarifiés dès le début du processus.
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Finalement, il est préférable d’assouplir les procédures administratives afin que les promoteurs puissent mettre en œuvre leur projet plus facilement et selon l’échéancier qu’ils envisagent.
Un mécanisme de participation publique plutôt robuste a été mis en place pendant l’élaboration du Masterplan 2030, sauf qu’il n’y a aucune information disponible pouvant nous confirmer qu’un tel processus a été reproduit pour la conception du projet au port d’Offenbach.
Le projet du port d’Offenbach s’insère effectivement à l'intérieur d'une vision globale, puisqu'il fait partie du Masterplan 2030.
Les dernières entreprises du port d'Offenbach ont abandonné le site autour de 1990. La mairie de la ville a fait un changement de zonage dès 1998 en vue de requalifier le site.
C'est une firme externe (CDM Smith), spécialisée en décontamination, qui a pris en charge la décontamination du site
LE PORT D'OFFENBACH
Références
Bart, I. L. (2010). Urban sprawl and climate change : A statistical exploration of cause and effect, with policy options for the EU. Land Use Policy, 27(2), 283‑292. https://doi.org/10.1016/j.landusepol.2009.03.003
Benali, K. (2012). La reconversion des friches industrielles en quartiers durables Aperçu théorique. Cahiers de géographie du Québec, 56(158), 297‑312. WorldCat.org. https://doi.org/10.7202/1014548ar
Dumesnil, F., & Ouellet, C. (2002). La réhabilitation des friches industrielles : Un pas vers la ville viable? VertigO, Volume 3 Numéro 2. WorldCat.org. https://doi.org/10.4000/vertigo.3812
Rey, E. (2002). The Ecoparc Project in Neuchâtel (Switzerland) : Sustainable regeneration of an urban wasteland. Passive and Low Energy Architecture, 5.
Sénécal, G., & Saint-Laurent, D. (1999). Espaces libres et enjeux écologiques : Deux récits du développement urbain à Montréal. Recherches sociographiques, 40(1), 33‑54. https://doi.org/10.7202/057243ar
Siedentop, S., Fina, S., & Krehl, A. (2016). Greenbelts in Germany’s regional plans—An effective growth management policy? Landscape and Urban Planning, 145, 71‑82. https://doi.org/10.1016/j.landurbplan.2015.09.002
Siikamaki, J., & Wernstedt, K. (2008). Turning Brownfields into Greenspaces : Examining Incentives and Barriers to Revitalization. Journal of health politics, policy and law., 33(3), 559‑594. WorldCat.org.
Xie, X., Kang, H., Behnisch, M., Baildon, M., & Krüger, T. (2020). To What Extent Can the Green Belts Prevent Urban Sprawl?—A Comparative Study of Frankfurt am Main, London and Seoul. Sustainability, 12(2), 679. https://doi.org/10.3390/su12020679